LA BOURSE ET LES COMPTES ENREGISTRÉS

Êtes-vous l’un de ceux qui ont profité de la forte remontée de la bourse après la période “Covid” ? Avez-vous été l’un de ceux qui ont suivi une formation sur la bourse et sur “comment s’enrichir en investissant”? Avez-vous ouvert un compte CELI afin de ne pas être imposé sur vos gains et intérêts ? Avez-vous fait de la spéculation avec votre CELI ou bien utilisé un robot (AI) pour gérer vos achats et ventes de titres ? Si oui, vous vous exposez à une vérification et certainement des problèmes !

En effet, la récente décision de la Cour canadienne de l'impôt dans l'affaire Ahamed c. The King met en lumière les risques auxquels s'exposent les investisseurs qui effectuent un volume considérable d’opérations dans leur CELI.

Fareed Ahamed est un conseiller en investissement de Vancouver qui a ouvert son CELI en 2009, lorsque le gouvernement fédéral l'a introduit pour la première fois. À la fin de l'année 2011, ses 15 000 $ de cotisations initiales avaient atteint plus de 600 000 $ de valeur. Il négociait principalement des penny stocks de petites sociétés minières cotées sur le TSX Venture Exchange. La plupart des actions étaient spéculatives et ne versaient pas de dividendes. La majorité des actions étaient détenues durant une courte période, soit quelques heures ou quelques jours.

Lors d’une vérification, l'Agence du revenu du Canada (ARC) a estimé que les activités de placements de M. Ahamed constituaient des revenus d’entreprise, pour les années 2009 à 2013 et que les revenus générés, bien qu’ils se trouvaient à l'intérieur d'un CELI, étaient en fait imposables.

Dans une décision récente de la Cour canadienne de l'impôt, le juge David E. Spiro a validé l'interprétation de l'ARC. La décision a été portée en appel par le contribuable et la cause n’a pas encore été entendue.

Qu'est-ce que l'ARC considère comme des opérations d'un jour (daytraiding) dans un
CELI ?

L'ARC a déjà soutenu que les opérations sur titres ne sont pas toujours effectuées au titre du capital et peuvent être considérées comme un revenu si le contribuable est réputé exploiter une entreprise. Selon l'ARC, certains des facteurs à prendre en considération pour déterminer si le comportement du contribuable indique qu'il exploite une entreprise sont les suivants :

  • la fréquence des transactions;
  • la durée de détention - les titres ne sont généralement détenus que pendant une courte période;
  • connaissance des marchés des valeurs mobilières - le contribuable a une certaine connaissance ou expérience des marchés des valeurs mobilières;
  • les transactions sur titres font partie de l'activité ordinaire du contribuable;
  • le temps consacré - une partie importante du temps du contribuable est consacrée à l'étude des marchés des valeurs mobilières et à la recherche d'achats potentiels;
  • financement - les achats de titres sont financés principalement sur marge ou par une autre forme d'endettement;
  • la publicité - le contribuable a fait de la publicité ou a fait savoir d'une autre manière qu'il était prêt à acheter des titres;
  • dans le cas des actions, leur nature - normalement spéculative ou sans dividende.

Il convient de mentionner qu'aucun des facteurs pris individuellement n'est généralement suffisant pour que les opérations d'un contribuable soient considérées comme une entreprise, mais qu'il faut plutôt tenir compte de la combinaison de ces facteurs.

Sur les radar des institutions financières

De plus, il nous paraît important d’indiquer que les institutions financières sont à même de surveiller la fréquence des transactions selon une mesure quantitative bien précise. En effet, les signaux d'alarme automatisés, notamment sur les serveurs informatiques des plateformes de transactions des courtiers en ligne autogérés, sonnent l’alerte de vérification dans le cas d’un “Achat-Vente-Rachat” sur un même titre dans un même compte dans une fréquence de transaction plus courte que le T+2 standard de la bourse.


Pour les néophytes, le “T+2” est égal à la date de transaction + 2 jours ouvrables afin que la transaction soit enregistrée de manière conforme par toutes les parties prenantes, notamment dans les livres du capital actions de l’entreprise.

Voici un exemple du délai minimum des transactions sur un même titre dans un même compte enregistré qui ne susciterait aucun signal d’alarme sur les plateformes de courtages.

  • Achat le 13 janvier: la transaction sera traitée et officialisée le 15 janvier
  • Vente le 15 janvier: la transaction sera traitée et officialisée le 17 janvier
  • Achat du même titre le 17 janvier: la transaction sera traitée et officialisée le 21 janvier (inclus les 2 jours du weekend)

Toute transaction ayant un délai plus court déclencherait l’alerte au courtier ainsi qu’une vérification automatisée, peu importe que l’action soit rachetée ou transigée sur les bourses canadiennes ou américaines, telles que les actions doubles listées.

Revenus de day-trading sur des comptes non enregistrés

Il faut donc ici distinguer le revenu d’entreprise (daytrading) et le gain en capital (investissement à long terme). Si un contribuable fait du daytrading sur son compte non enregistré, son bénéfice est imposable à 100 % alors que seulement une partie du gain en capital est imposable pour l’investisseur à long terme. En sommes, la différence d’impôt à payer passe du simple au double (et plus) sans compter tous les effets sur diverses prestations et cotisations. Ce traitement fiscal peut s'appliquer aux devises, y compris aux cryptomonnaies.


La décision Ahamed, bien qu'elle fasse l'objet d'un appel, constitue un avertissement pour les autres investisseurs qui se livrent à des opérations journalières ou à d'autres activités spéculatives dans le cadre d'un CELI. En effet, la Cour a appliqué ce même traitement malgré l’exemption d’impôt particulière qui est offerte au CELI. Qu’en est-il des autres régimes de retraite enregistrés les plus communs ?

Autres comptes de retraite enregistrés 

Les régimes enregistrés d'épargne-retraite (REER) et les fonds enregistrés de revenu de retraite (FERR) sont aussi exonérés de l'impôt sur le revenu. Toutefois, la rédaction du texte de loi des REER et FERR est différente de celui qui concerne le CELI. Dans le cas du REER et de FERR, le revenu généré dans une situation similaire à celle exposée dans la décision d’Ahamed ne serait pas imposable au sein d’un REER ou d’un FERR dans la mesure où les activités de négociation se limitent à l'achat et à la vente d'investissements admissibles.


Les placements admissibles comprennent notamment les liquidités, les obligations, les certificats de placement garanti (CPG), les actions, les fonds communs de placement, les fonds négociés en bourse, les bons de souscription et les options, les devises, l'or et l'argent, ainsi que d'autres titres et fonds de placement cotés en bourse.

On peut donc se questionner sur la logique de cette différence. La principale motivation est que les retraits du CELI ne sont pas imposables alors que ceux des deux autres régimes le sont. La seconde raison est que les sommes détenues dans les REER et FERR seront imposées au plus tard au décès du bénéficiaire à moins d’exceptions. Donc, dans le cas des FERR et REER, c’est simplement un report d’impôt alors que les opérations de daytrading au sein du CELI échapperaient complètement à l’impôt. La Loi n’est pas toujours bien pensée, mais, ici, on a un bel exemple où les règles ont été bien pensées afin de préserver l’assiette fiscale.


En sommes, soyez certains que les autorités fiscales auront dans leur mire les contribuables qui tentent de profiter des régimes fiscaux à d’autres fins que celles prévues initialement. Prenez quelques instants pour nous contacter afin d’en savoir plus et être bien accompagné!

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