N’en déplaise à mes amis du domaine des services financiers, je commence à être fatigué des nombreuses publicités et rappels concernant la période du Régime enregistré d’épargne retraite (« REER »). C’est comme si ne pas cotiser aux REER d’ici le 1er mars était synonyme d’une occasion ratée, d’une opportunité manquée.
Avant d’aller plus loin, j’aimerais être très clair sur le point suivant : il est toujours recommandé d’épargner. Cependant, le REER n’est pas nécessairement le véhicule que tout contribuable canadien devrait prioriser. Il est possible d’acheter les mêmes actifs, mais dans un compte différent : le petit frère du REER, soit le Compte d’épargne libre d’impôt (« CELI »), né en 2009.
En résumé, le REER apporte une déduction fiscale. La cotisation réduit d’un montant équivalent les revenus à imposer et entraîne dans bien des cas un remboursement d’une partie des impôts prélevés à la source pendant l’année. Le REER sera imposable lors de l’année du retrait, au taux d’imposition marginal du contribuable.
Le CELI, c’est l’inverse. Et est beaucoup plus simple : il ne donne droit à aucune déduction, mais ne sera pas imposable lors du retrait.
L’objectif ultime du REER est de prendre la déduction à un haut taux d’imposition marginal et de retirer le REER à la retraite, lorsque le taux d’imposition marginal est inférieur. L’économie d’impôt serait ainsi réalisée.
Or, ce n’est pas toujours le cas. Bien des fonctionnaires et autres prestataires de fonds de pension reçoivent près de 70 % de leur salaire à leur retraite. Combiné à la prestation de sécurité de vieillesse (« PSV »), les revenus provenant de fonds non-enregistrés et des autres revenus potentiels, le taux d’imposition pourrait être plus élevé à la retraite. Même si celui-ci est inférieur, souvenez-vous qu’entre 75 910 $ et 121 314 $ [1] de revenus nets, la PSV doit être remboursée. Un impôt caché d’un peu plus de 8 % [2], souvent négligé.
[1] En 2018. Agence du revenu du Canada
[2] Selon le Centre québécois de formation en fiscalité, « Déclarations fiscales des particuliers », Chapitre C, 2017. http://cqff.com/
Ce serait presque d’aucune utilité de cotiser à un REER lorsque le revenu est de moins de 14 890 $, car c’est le seuil d’imposition nulle du Québec pour 2018. Avec le crédit de base, aucun impôt n’est payable, donc il n’y a aucun avantage immédiat à diminuer son revenu imposable avec une cotisation REER.
Il est donc beaucoup plus avantageux pour un étudiant, un travailleur à temps partiel ou pour un travailleur à faible à faible revenus de cotiser au CELI. Son investissement et tout le rendement réalisé pourra être retiré sans impôt dans cinq, dix, 20 ou 50 ans! Et ce, sans égard à son taux d’imposition marginal lors du retrait.
Dans le cas où l’on sait d’avance que nous devrons retirer les fonds, il est rarement une bonne idée d’investir via le REER. Certains régimes permettent de retirer les fonds versés dans un REER sans impact fiscal, comme le Régime d’accession à la propriété [3] et le Régime d’encouragement à l’éducation permanente [4].
Sinon, l’impôt devra être payé lors du retrait REER. Ainsi, si l’on prévoir déjà effectuer un retrait, on doit aussi prévoir l’impôt y afférent. Vous constaterez que c’est rarement avantageux de cotiser au REER en pareille situation. Le taux d’imposition marginal prévu lors du retrait doit toujours être évalué.
Par ailleurs, le CELI peut être une bonne option pour un « fonds d’urgence ». En cas de besoins monétaires imprévus, la dernière chose qu’on aimerait est de payer de l’impôt sur nos retraits REER!
[3] Agence du revenu du Canada
[4] Agence du revenu du Canada
Il est possible dans diverses situations qu’un contribuable n’ait pas accumulé beaucoup d’espace REER. Ce peut être le cas d’un professionnel incorporé qui se verse des dividendes, par exemple.
Cette personne aurait sans doute intérêt à garder son espace REER limité pour les années de hauts revenus, afin d’obtenir la plus haute déduction possible le temps venu.
Il est possible que cet espace REER ne soit jamais utilisé. Cependant, s’il arrive une année avec de hauts revenus (vente d’un chalet ou d’un immeuble à revenus, important bonus, gain en capital résultant de la vente d’actions, etc.), ce pourrait être un outil important à avoir afin de limiter la facture fiscale.
Il pourrait être judicieux d’utiliser le CELI lorsque l’objectif est d’investir dans un placement à haute espérance de rendement. Ainsi, si la valeur du placement augmente de façon importante, tout le gain en capital ne serait pas imposable.
Dans un REER, ce gain en capital serait imposable et serait même totalement inclus au revenu (au lieu du 50 % habituel), car un retrait REER ne garde pas la nature du revenu : il est imposé tel quel.
Notons cependant qu’un rendement élevé est souvent synonyme de risque élevé. Si l’investissement ne performe pas comme prévu, il en résulterait une perte en capital dans un CELI, ce qui n’est pas recommandé compte tenu de la limite de cotisation fixée à 57 500 $ en 2018.
Aussi, il ne faut pas se prendre pour un financier de Wall Street dans son CELI : le « daytrading » pourrait être considérer comme du revenu d’entreprise et ne pas être admissible au CELI.
La réponse dépendant bien entendu de votre situation, la discussion CELI vs REER, est un faux débat, choisissez celui qui convient le mieux à vos besoins, et pourquoi pas les deux? J’aimerais mentionner qu’il n’y a rien de mieux qu’une bonne planification financière et fiscale afin de bien allouer les actifs à l’intérieur des comptes enregistrés et non-enregistrés.
Chaque dossier est différent et il y a bien plus de cinq aspects à considérer.
La majorités des planificateurs financiers comprennent cet aspect fiscal et peuvent facilement répondre aux questions de leurs clients à ce sujet.
Pour un dossier plus complexe ou pour une évaluation de votre planification financière et fiscale complètement indépendante, contactez-nous.
Publié le 15 juillet 2017
Mis à jour le 14 janvier 2020